Vœux de Monseigneur Louis de Bourbon

« La France doit retrouver son âme » : les vœux de Louis XX pour 2023

Louis XX, Marie-Marguerite de Bourbon et leurs enfants.

À l’occasion du 230e anniversaire de la mort de Louis XVI, le 21 janvier 1793, le Duc d’Anjou dresse un bilan de l’état de la France, et présente ses vœux pour l’année à venir :

« Janvier, temps de vœux ! Et pour moi, chef de la Maison de Bourbon, successeur des rois de France, temps d’une réflexion sur le fait politique, réflexion toujours renouvelée en souvenir de la mort du roi Louis XVI il y a 230 ans, qui continue à donner lieu à de nombreuses cérémonies. Elles ne sont plus seulement expiatoires mais, ce premier procès politique incite à réfléchir à la finalité du pouvoir. Son lien avec la société qui, s’il est perdu, rompt le pacte de confiance entre le peuple et ses institutions et donc brise ce qui fait la raison même de l’État.

En 2022, la France a connu des situations que nous pensions ne plus jamais avoir à vivre, à l’époque contemporaine. Notre pays a été soumis à des pénuries dans des domaines aussi vitaux que certains produits alimentaires ou certains médicaments ; son horizon s’ouvre sur des perspectives de restrictions en matière d’énergie. À ces maux s’ajoutent l’insécurité grandissante et la hausse du coût de la vie. De tels fléaux ne fragilisent pas seulement les familles : ils révèlent la dissolution de notre souveraineté. Cet état de fait découle de décisions prises depuis des décennies, sans considération ni du bien public, ni du réel. Le mirage de la consommation effrénée reposant sur une mondialisation non maîtrisée, ajouté au relativisme et au reniement des valeurs les plus élémentaires, se révèle peu à peu au grand jour, dans sa triste réalité. Malgré les cris d’alarme autant que de détresse que l’autisme politique n’a pas voulu entendre, la situation d’un nombre croissant de nos concitoyens s’est détériorée.

Les pauvres sont encore plus pauvres et toujours plus nombreux, puisque la pauvreté touche désormais les anciennes classes intermédiaires et les retraités ; certaines provinces sont de véritables déserts sociaux, économiques, sanitaires, et bien sûr culturels. La crise s’est étendue et frappe toute la société matériellement et spirituellement. Déjà, nous voyons s’annoncer des lois inhumaines qui mettront en péril l’existence même des plus âgés et des malades. Alimentée par la démagogie ou le souci de plaire à quelques groupes de pression, une telle politique trahit sa mission la plus haute. Exactement le contraire de ce qu’avait voulu montrer par son sacrifice, le roi Louis XVI qui, dans son testament demande à Dieu de pardonner ses ennemis.

À bien des égards, notre société est à reconstruire. L’exemple de ce que fut la royauté française et ses réussites peut servir de guide à tous les Français de bonne volonté qui voudront s’atteler à cette tâche immense. L’histoire nous montre que ces sursauts sont possibles quand l’espérance en une destinée commune reprend le dessus. Ce fut le cas après la guerre de Cent Ans, ce le fut après les guerres de religion ; ce le fut lors de la Restauration, après les errements tragiques de la Révolution et de ses suites. Soucieux de son avenir voulu et non subi, le peuple de France a toujours su retrouver son énergie, son esprit d’initiative et sa volonté.

Or, au-delà du marasme et des crises, je constate que de nouvelles initiatives, courageuses et positives, font jour dans de nombreux domaines. De tels sursauts suffisent à nous redonner espoir. Il est de mon devoir de les soutenir et de les encourager, partout où cela est possible. Ce renouveau se manifeste en particulier dans le domaine de l’éducation, si gravement touché par des réformes absurdes inspirées d’idéologies destructrices. À l’heure actuelle, des écoles cherchent à retrouver le véritable sens des études, à transmettre les valeurs essentielles de la culture, si nécessaires à l’épanouissement des jeunes. Le mouvement, qui avait commencé par les petites classes, atteint désormais l’enseignement supérieur. Un mouvement similaire s’observe parmi ceux que l’on nomme les nouveaux agriculteurs. Ces hommes et ces femmes ont le courage de placer leur si belle mission – nourrir leurs concitoyens – avant les objectifs que la technocratie cherche à leur imposer.

Je tiens aussi tout particulièrement à souligner la contribution au bien commun des entreprises locales, qui luttent pour développer, partout en France, l’activité économique et l’emploi. C’est en général par leur souci d’authenticité, leur fidélité aux traditions des provinces où elles sont implantées que se distinguent ces entreprises plaçant l’éthique avant le seul profit financier. On ne saurait trop encourager les entrepreneurs qui acceptent les risques inhérents à une telle aventure. Leur énergie et leur enthousiasme contribuent à faire vivre notre pays. Il n’est pas moins réconfortant d’observer qu’en matière de santé, de nouveaux établissements – tant de soin que de recherche – accomplissent un travail admirable. Là encore, les initiatives personnelles et le dévouement viennent remédier à l’incurie des pouvoirs publics et assurent un service essentiel, y compris dans des zones souvent délaissées par l’État. L’extraordinaire abnégation des soignants, la haute idée qui les guide dans l’accomplissement de leur tâche, contribuent à rendre notre société plus humaine.

Les Français savent renouer avec les vertus de leur histoire pour eux-mêmes et le monde. La France ne doit pas seulement retrouver sa puissance ; elle doit, plus encore, retrouver son âme. En cela, elle se montrera fidèle au programme millénaire de la monarchie tout en étant un exemple pour les autres nations.

Chacun d’entre nous, quelle que soit la place que la providence lui a assignée, doit contribuer pour sa part à ce sursaut. Autant que possible, notre engagement pour le bien commun doit se manifester en toutes circonstances, dans nos vies professionnelles aussi bien que familiales. La société ne se réformera que si nous savons prendre nos responsabilités, ce qui signifie pour les Français être fidèles aux promesses de leur histoire. Tels sont les vœux que je forme pour la France à l’aube de cette année nouvelle. »

Louis, Duc d’Anjou
Chef de la Maison de France

Tribune initialement publiée dans Le Figaro, 21 janvier 2023.

Voeux de Noël de Monseigneur le Duc d’Anjou

Duc d’Anjou et prétendant légitimiste à la couronne de France, Louis de Bourbon rappelle en quoi la fête de Noël doit susciter en nous tous un sursaut d’espérance. Tribune.

Chez tous les Français attachés à leur patrie et à leurs traditions ancestrales, chez tous les Européens préoccupés par l’avenir de notre civilisation, chez tous les fidèles soucieux de faire entendre au monde le message du Christ, la fête de Noël doit susciter un sursaut d’espérance. Sans doute, les sociétés modernes – et tout particulièrement la France – n’ont jamais été si éloignées de l’idéal de paix, de justice, d’union et de charité fraternelle qui trouve son expression la plus profonde dans les célébrations de la Nativité. Pourtant, dans son insondable mystère, l’Incarnation demeure le plus bouleversant appel à la renaissance et au salut qui ait jamais été adressé à notre monde. Un appel dont l’actualité est rappelée chaque année depuis des siècles et des siècles.

Ce message d’espoir est destiné à tous les hommes ; mais les habitants des vieux pays de chrétienté qui sont les nôtres ont une responsabilité toute particulière dans sa transmission. À l’exception des quelques brèves périodes de notre histoire où le fanatisme anti-chrétien a atteint son paroxysme, la venue au monde du Sauveur a toujours réconcilié pour un bref moment ceux de nos compatriotes qui s’opposaient à l’Église avec ceux qui demeuraient fidèles à la foi de leurs pères. La preuve en est que l’attachement à la fête de Noël a non seulement perduré pendant des siècles mais a surtout conservé assez de force pour suspendre les conflits les plus sanglants.

En 1914 et 1915, des soldats français, britanniques et allemands, interrompant les hostilités de manière spontanée, donnèrent l’exemple d’une telle réconciliation. En imposant ces trêves de Noël, les combattants des tranchées préfiguraient sans le savoir les efforts héroïques entrepris au nom des valeurs chrétiennes par le Pape Benoît XV, l’Empereur Charles Ier et les princes Sixte et Xavier de Bourbon-Parme pour mettre un terme à cette guerre fratricide en 1917. Tous – Pape, Empereur, princes et simples soldats – étaient mus par le désir de se montrer fidèles à quelque chose qui les dépassait infiniment. La transcendance, le souci du dépassement triomphait de tous les obstacles. Cent ans après notre humanité serait-elle moindre ? Je ne peux le croire !

Même si de nombreuses voix réclament que les Français répudient ce qui a fait l’essence même de leur grandeur et de leur civilisation, le vieux fonds chrétien demeure présent. Le déclin actuel dans la pratique des sacrements n’effacera jamais les traces que des siècles de foi intense ont laissées dans le cœur des peuples d’Europe. Les églises trop souvent délaissées durant l’année seront pleines les 24 et 25 décembre. C’est pourquoi l’on commet une grave erreur, en supposant que l’indifférence actuelle conduira fatalement à la disparition de tout sentiment religieux : les braises brûlent encore sous la cendre. L’émotion que la fête de Noël continue à susciter en est une preuve évidente, de même que les nombreuses initiatives portées par des jeunes, ce qui est très encourageant. D’ailleurs, si certains désirent avec tant de force s’attaquer aux symboles de Noël, en débaptisant les vacances de Noël, en exigeant que l’on supprime les crèches des espaces publics, en exaltant plus le consumérisme que la fête religieuse, ces attaques ne sont-elles pas le signe que l’essentiel est toujours là ?

Si un enfant a pu vaincre le mal, la force de tous les tyrans n’est vraiment pas grand-chose

Ne tombons pas pour autant dans le piège d’un optimisme béat. Si Noël est d’abord la fête de tous les Chrétiens, c’est aussi une fête de portée universelle qui réunit les familles et contraint, durant une trop brève période, la société agnostique – voire païenne – dans laquelle nous vivons à se préoccuper de ses membres les plus fragiles. Ceux de nos compatriotes qui manifestent de manière ostentatoire leur indifférence pour la fête que nous allons célébrer s’associent donc – qu’ils en soient conscients ou non – aux attaques contre la famille et au mépris des plus pauvres. Comme tous nos Rois, à la suite de Saint Louis, je demeure du côté des humbles, de ceux qui ont besoin de notre soutien et envers lesquels le Sauveur a fait preuve d’une sollicitude toute particulière.

Quel contraste avec l’attitude qui prévalait dans la France profondément catholique du Grand Siècle ! Il suffit pour s’en convaincre de relire les propos de Bossuet dans un sermon qui fut prêché, devant mon aïeul, Louis XIV, et toute la Cour de France le jour de Noël 1665 : « Ce qui nous empêche d’aller au souverain bien, c’est l’illusion des biens apparents ; c’est la folle et ridicule créance qui s’est répandue dans tous les esprits, que tout le bonheur de la vie consiste dans ces biens externes que nous appelons les honneurs, les richesses et les plaisirs. Étrange et pitoyable ignorance ! » Plus de deux mille ans après l’Incarnation, ces mots nous invitent à nous souvenir de l’essentiel. Puissent-ils être entendus aujourd’hui !

Lors de la naissance de l’enfant Jésus, Hérode semblait triompher avec ses lois iniques ; les riches n’étaient pas avec les parents du Christ, rejetés dans une humble étable. C’est pourtant le dépouillement qui a triomphé, et l’esprit de justice contre l’iniquité. Comme les Bergers, comme les rois Mages venus adorer le fils de Dieu nouveau-né, sachons résister avec courage. C’est notre espérance qui nous rend forts, presque invincibles. Comme je l’ai dit encore récemment, le monde se meurt de n’être pas plus chrétien. C’est là l’unique source des mauvaises lois, des mesures contre nature présentées comme des progrès ; c’est pour cette raison que la famille naturelle se trouve remise en cause. Mais nous ne devons pas nous décourager. Telle est justement la force de Noël : chaque année, ce temps liturgique parmi les plus forts nous rappelle que, même si nous pouvons avoir l’impression que nous chavirons, il suffit de se tourner vers le petit enfant de la crèche pour savoir que rien n’est impossible. Si un enfant a pu vaincre le mal, la force de tous les tyrans n’est vraiment pas grand-chose.

Ainsi ce soir, je me tiens au pied de la crèche, avec mon épouse, la Princesse Marie-Marguerite et nos quatre enfants, en espérant mieux pour notre pays, mieux pour demain, mieux pour tous ceux qui pensent qu’au-delà des égoïsmes humains il y a un bien commun à partager et qui nous réunit tous. C’est pourquoi, alors que nous nous apprêtons à célébrer la naissance du Sauveur, je souhaite adresser un message d’encouragement et d’amitié à tous les Français fidèles à cette tradition. Puisque l’attachement à la fête de Noël s’est maintenu malgré toutes les vicissitudes de l’histoire, il est de notre devoir de conserver intacte et vive cette flamme d’espérance.

Source : https://lincorrect.org/

300° anniversaire du Sacre de Louis XV à Reims – Message de Mgr le Duc d’Anjou

Nous commémorons aujourd’hui le tricentenaire du Sacre du Roi Louis XV à Reims, le 25 octobre 1722. J’aurais dû assister aux cérémonies qui s’y sont déroulées les 22 et 23 octobre, en présence des autorités religieuses, culturelles et politiques, mais des contraintes de dernière minute m’ont hélas empêché de m’y rendre.

Cette commémoration est l’occasion de rappeler ce que représente le Sacre, un évènement parmi les plus éminents de la Royauté. A ce titre, le Sacre compte encore de nos jours parmi les cérémonies les plus connues de l’ancienne France, et ce alors même qu’il était assez rare : il y en eut seulement deux au XVIIIème siècle, deux au XVIIème. C’est que le Sacre revêt une dimension politique de tout premier plan. Il permet en effet de réaffirmer, roi après roi, la transcendance sans laquelle il n’est pas de vrai pouvoir, à la fois fort et équilibré. Mettre le divin au cœur du pouvoir permet d’abord au Souverain d’avoir toujours présent à l’esprit qu’il n’est pas un maître absolu, parce qu’il n’est pas lui-même à l’origine de son propre pouvoir, et qu’il devra par suite rendre des comptes de l’exercice de ce pouvoir devant Dieu. Cela permet aussi à ses sujets de se souvenir qu’il y a un ordre des choses, qui dépasse la volonté et les désirs des hommes, et qui ne saurait être enfreint sans péril

Comment ne pas y être tout particulièrement sensibles en des jours où les événements tragiques se multiplient dans notre pays, jusqu’à parfois atteindre des sommets d’horreur, comme tout dernièrement avec le meurtre barbare de cette jeune enfant à Paris ?

L’onction du Roi consacrait ainsi le bien commun comme principe qui légitime le pouvoir, celui du plus grand et du plus puissant comme celui du plus humble. Le Sacre rappelait que, tous, nous sommes responsables de nos actes. Les Rois, mes ancêtres, le savaient et le serment qu’ils prononçaient au jour du sacre demeurait pour toujours leur principale loi. C’est ce qui fit la grandeur de leur office pouvant aller jusqu’au sacrifice, comme pour Louis XVI.

Puisse ce tricentenaire nous donner l’occasion de redécouvrir le sens du pouvoir comme service de la communauté, d’un pouvoir qui revêt de ce fait par nature une dimension transcendante. Ainsi une nouvelle fois la commémoration servira l’action ; la mémoire servira au présent.

Louis, Duc d’Anjou